Mary CASSAT |
Il n'y a pas de fruit sans peine
Mon tout petit, mon en-dedans,
voici qu'a sonné l'heure à l'horloge du Temps,
il te faut donc venir, par delà mes frontières,
prendre une place entière au monde des vivants !
Lové dans ta prison d'argile, tu m'appelles sans bruit.
Ton cri silencieux trouve un écho docile
dans ma chair qui devient fruit.
Ton appel retentit, intense et pénétrant.
Je l'entends résonner longuement
au profond de moi-même.
Je le sens m'envahir
dans un effort suprême,
étrange et douloureux débordement
qui cherche à t'arracher à moi...je n'y résiste pas!
Car, il est venu le temps béni de nos moissons.
semence intime de l'amour,
coeurs battant à l'unisson,
il nous faut peiner pour que naisse
ta première aurore !
Luttons avec espoir.
Peinons avec courage.
Nos efforts conjugués pour t'ouvrir un passage
font haleter mon corps et crisper mon visage.
tes poussées entêtantes, surhumaines,
me dilatent jusqu'à l'extrême,
ravagent mes digues,
dispersent mes gonds!
Ah! ce sont nos liens qu'à cet instant tu romps!
Liens de chair , de sang dont tous les fils ténus
au plus secret de moi te voulaient retenu !
Toute cette glaise qui est moi,
s'entrouvre, se fond, se brise,
je deviens source, je m'enlise
quand, du creuset tourmenté de mon ventre en gésine,
voilà qu'enfin, tu sors et te délivres !
Tout ruisselant encore de ta sève utérine,
tu abordes la calme et tiède rive
où mes bras forment pour toi, en tremblant,
un nid d'amour triomphant!
Si j'ai souffert à crier de douleur
sous tes coups impérieux qui martelaient mon coeur,
si j'ai désespéré, si j'ai perdu courage,
il me semble à présent qu'un ciel bleu sans nuages
m'annonce un cortège de jours plus lumineux.
La peine est passée, j'oublie le laborieux voyage
pour goûter pleinement cet instant bienheureux.
Petite présence chaude et confiante à mon côté,
en ton amour, déjà tu me retiens captive
et ton souffle à mon front fatigué
met des fraîcheurs d'eau vive.
Fruit de passion, fruit d'allégresse,
épanoui au soleil de mon coeur,
au faîte de l'émoi, mon corps, mon âme en liesse,
dans tes yeus délavés découvrent le Bonheur
et quand on me demande ce qui les fait chanter,je t'élève en offrande
aux mères du monde entier !
extrait de "Féminitude" de Danielle T.
texte protégé
Merci Danielle pour ce texte superbe !
RépondreSupprimerC'est magnifique de sensualité et d'amour, tu me ferais presque regretter un choix obstinément incompréhensible fait très tôt dans ma vie de femme, sur lequel je ne suis jamais revenue mais tes mots réveillent sans doute une part manquante muette... Merci d'avoir partagé ce beau poème d'une féminitude absolue !
RépondreSupprimerC'est beau Danielle. Merci ! Quelle intensité !
RépondreSupprimerTu nous fais revivre un grand moment !
Bravo !